Alec Covin - Deux et demi

Nous attendions tous avec impatience la suite et fin de la trilogie des Loups de Fenryder. Un an est passé sans qu'Alec Covin ne nous livre notre dose annuelle. Mais il est de retour enfin… Mais pas avec le livre que nous pensions.

Deux et demi, ou le roman du Diable est un tournant dans la carrière de ce jeune écrivain. Et ce pour plusieurs raisons. Mais déjà voyons un peu ce que nous raconte ce roman. Il est question de deux femmes qui ont fait le choix de s'isoler totalement pour que l'une d'elles recouvre l'imagination et la passion de son métier d'écrivain. Amantes, elles vont en profiter pour profiter pleinement de cette maison de rêve en pleine forêt de Fontainebleau. Imaginez la scène. Une maison à l'écart de tous, et de toute autre habitation. Une bâtisse récente faite de pierre et de baies vitrées avec une piscine dans laquelle on peut se baigner sans craindre les regards de curieux. Grace, l'auteure, et Kate, son amante, vont vivre heureuse. Et la fièvre de création va s'éprendre de Grace. Tout pourraient aller parfaitement pour ces deux jeunes femmes amoureuses. Un décor digne de l'Eden, et Grace retrouve son plaisir à écrire. Seulement voilà. Elles ne sont pas deux dans cette maison. Un personnage s'invite sans prévenir. Et il emmène avec lui ses amis. Ce ne sont pas forcément des visites agréables.

En effet, dans ce roman construit en huis clos, trois personnages se disputent l'avant de la scène. Dans un premier temps, il y a Grace: un auteur qui a perdu sa verve depuis qu'elle est avec sa jeune maîtresse. Elle est heureuse et ne trouve plus cette douleur en elle dans laquelle elle puisait pour écrire ses polars. Et là, elle retrouve l'inspiration. Une inspiration qui n'est pas naturelle reste une inspiration. Et Grace sent bien que le roman prend possession d'elle et non plus l'inverse. Mais n'est-ce pas ce que recherche tout auteur?
Et puis, vous avez Kate, cette jeune maîtresse aimante. Elle veut ce que Grace veut. Elle ne veut que son bonheur. Seulement, les choses changent un peu lorsqu'elle voit ce qu'elle aime éperdument se perdre dans sa nouvelle œuvre. Elle se sent délaissée. Elle se sent malheureuse. Alors elle se tourne vers ce mystérieux troisième personnage.
Ce personnage est personnifié à travers le roman par divers artifices, et différents prismes. Mais il s'agit de la maison. La maison est vive, et elle est plus qu'un décor. Et là réside une grande force de l'écriture d'Alec. La bâtisse est plus qu'un décor pour devenir un personnage à part entière. Il détourne un basique de la littérature fantastique, la maison hantée pour en tirer l'exacte contraire. Alors qu'elle devrait être austère, terrifiante et fermée, la maison ici est ouverte sur le monde par les grandes baies vitrées, très accueillante et semble bienveillante. Mais ce n'est pour mieux réussir à arriver à ses fins.

Ce roman est un roman d'amour à plusieurs étages. Déjà entre les personnages, Grace et Kate, mais aussi entre les Fisto et leur ami Natas. Dans un second temps, c'est un roman entre l'auteur et la littérature fantastique et les mots. On découvre ainsi après une lecture attentive une manne de références plus ou moins cachées au diabolique. Je peux vous citer Natas (=Satan), les Fisto (= Mephistofelès ou encore Faust) ou encore Batholomé (= un ange déchu compagnon de Satan). Et je ne vous ai pas tout dit. Il y a aussi ce détournement de la maison hantée pour en garder la principale force: l'isolement et des personnages forts. Et enfin, c'est une histoire d'amour entre un auteur et son métier. En effet, ce roman est une magnifique rétrospection d'Alec sur sa condition d'écrivain. Apprenti écrivain, vous y apprendrez des choses.
Enfin, je finirai en disant que ce roman a été dévoré en deux jours. Et ce ne fut pas plus rapide parce que je travaillais. Ce livre est pour moi un bijou qui mérite le détour. Je pourrai vous en parler encore durant des heures. Mais bon…

Aucun commentaire: